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Par : Admin
Publié : 15 août 2009
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Histoire de Soudaine Lavinadière

Si une partie de l’histoire du prieuré du Saint-Sépulcre de Lavinadière était connue dès 1980 grâce aux recherches historiques de G.Bresc-Bautier, le lieu même de cette implantation religieuse en Corrèze restait un mystère. En effet, nulle trace conservée de bâtiments le composant ne pouvait permettre d’identifier l’emplacement du prieuré et de ses dépendances : le site de Lavinadière devait donc encore être considéré, à cette date, comme totalement disparu…

C’est à la fin de 1995, à l’occasion de travaux d’assainissement menés par la municipalité d’alors, que l’attention des archéologues a été attirée par plusieurs indices laissant supposer la présence de vestiges au nord l’église de Lavinadière, au contact de celle-ci, sous la parcelle de pré voisine … Les sondages d’ampleur limitée réalisés fin 1995-début 1996 au moment des travaux de drainage ont ainsi permis à l’équipe qui aujourd’hui encore poursuit les recherches de repérer des restes de murs appartenant indéniablement à des vestiges de bâtiments anciens. Mais c’est surtout la découverte de deux pierres tombales en granite décorées de la croix patriarcale (croix à double traverse) qui permis alors d’émettre l’hypothèse de la présence autour de l’église du prieuré disparu de Lavinadière.

A partir de cette date et jusqu’en 2003 l’équipe de recherche a, de manière ponctuelle, développé plusieurs approches complémentaires destinées d’une part à tester le potentiel archéologique du site (prospections géophysiques et sondages) ou la connaissance de celui-ci et de l’église (recherches d’archives, étude de l’architecture de l’édifice). Parallèlement, l’ensemble du site (église et vestiges archéologiques) bénéficiait d’un classement au titre des monuments historiques (13 juin 2003), signe de la valeur historique et archéologique du site et de l’intérêt porté à celui-ci par les pouvoirs publics (Etat et collectivités territoriales).

L’année 2003 marque le début du processus d’étude approfondie du site qui se poursuit encore aujourd’hui. Parallèlement au développement des recherches d’archives (important fonds des archives dites de « l’ordre de Malte » conservées à Lyon), à une enquête sur l’environnement historique du site qui a déjà permis de mieux connaître la seconde implantation religieuse identifiée sur la commune de Soudaine-Lavinadière (prieuré de Magoutière), c’est surtout la réalisation d’une fouille annuelle programmée (cinq campagnes jusqu’en 2008) qui révèle peu à peu le site archéologique du prieuré dans toute sa complexité architecturale et son évolution jusqu’au moment de sa disparition.

UN SITE COMPLEXE : DU PRIEURE DE L’ORDRE DU SAINT-SÉPULCRE A LA COMMANDERIE HOSPITALIÈRE DE LAVINADIÈRE
Les recherches en cours s’attachent à documenter puis restituer l’histoire de l’implantation des chanoines du Saint-Sépulcre de Lavinadière du moment de son apparition à celui de son abandon. Pour ce faire, elles s’appuient sur l’interprétation des témoins matériels mis au jour par l’archéologie (murs, couches et mobiliers archéologiques…) et la recherche historique (documents écrits). Ici, rien n’est acquis définitivement et chaque nouvelle campagne apporte son lot d’informations inédites, mais aussi de questions nouvelles. Les premiers résultats présentés dans le présent document ne doivent donc pas être considérés comme définitifs, la poursuite des recherches est largement susceptible de les compléter et les modifier.

DESCRIPTION DU SITE
Les vestiges les plus anciens correspondent à l’église (privée de ses chapelles latérales et de l’ajout en forme abside contre le chœur, à l’est qui sont de création très récente), à un fossé qui borde l’édifice religieux au nord et à trois fosses-silos. Ces éléments peuvent dater des XIIe et XIIIe siècle., à partir de la donation initiale effectuée par le vicomte de Comborn Archambaud IV au XIIe siècles, mais il est probable que seule l’église soit ici la plus ancienne.

C’est surtout au cours des XIIIe et XIVe siècles que le prieuré se développera. La première mention écrite attestant de la présence d’un établissement du Saint-Sépulcre à Lavinadière (Vinhareria) datant de 1263. Les vestiges de cette période sont encore très mal connus. En effet, les reconstructions postérieures ont largement amputé, voire effacé les bases des premiers bâtiments qui se retrouvent pour l’essentiel sous les constructions plus tardives. Il reste donc délicat de préciser leur emprise, leur architecture et leurs fonctions. Les premières données disponibles ne permettent pas de confirmer la présence de bâtiments organisés autour d’un cloître, même si un premier bassin est attesté pour cette phase d’occupation. Il n’est pas impossible que cette première domus (maison) de Lavinadière ne soit composée que de plusieurs bâtiments dissociés dans un espace ouvert à proximité même de l’église.

Probablement vers la fin du XVe siècle le prieuré va subir une véritable métamorphose architecturale : les anciens bâtiments vont être démolis, voire rasés pour certains et l’on va édifier à leur place un ensemble de bâtiments rectangulaires disposé en « L » délimitant une cour avec l’église où l’on bâtira un nouveau bassin/fontaine en incluant le puits médiéval et en réutilisant en partie des éléments architecturaux plus anciens (porte en arc brisé décoré d’une moulure en tore…). Ces deux corps de logis témoignent d’une architecture au « goût du jour » : espaces plus vastes, parties résidentielles réparties à l’étage des constructions et distribuées par un escalier à vis dans une tourelle carrée en saillie de la façade du logis septentrional, alors que le rez-de-chaussée est voué aux fonctions domestiques : cuisines, écuries, four à pain, espaces de stockage…

C’est au cours de cette même période, mais dans un deuxième temps que le prieuré va intégrer dans son architecture des éléments défensifs, du moins de manière symbolique : un fossé sera creusé à l’est et une tour, probablement équipée de quelques ouvertures de tir, sera édifiée à l’angle du corps de logis oriental. Lors de cette phase, le prieuré, devenu progressivement commanderie hospitalière, prendra l’apparence d’une véritable « maison-forte » à l’image de nombreuses constructions de la petite aristocratie limousine de l’époque. Au delà de ce dernier aspect on notera que l’archéologie révèle également les nombreux aménagements annexes qui accompagnaient les bâtiments en dur et s’appuyaient contre leurs murs : appentis sur poteaux destinés à abriter les voitures ou le bois de chauffage, latrines à l’étage ou encore l’exceptionnel atelier de forgeron dont les traces ont été découvertes contre l’angle de l’un des deux logis. Ces éléments témoignent eux aussi de l’importance des équipements indispensables à la bonne marche d’implantations, certes d’origine religieuse mais qui étaient tout autant des centres de domaines agricoles depuis le Moyen Age jusqu’à l’époque Moderne.

Ruinés au XVIIe siècle, comme nous l’apprend un document de 1654, les bâtiments de la commanderie seront systématiquement démolis : la plupart des pierres taillées seront récupérées, le tout venant de maçonnerie servira à combler le fossé oriental et à recouvrir les fondations des bâtiments. C’est à ce moment, probablement à l’instigation d’Étienne de Pradal, que sera construite, une centaine de mètres au sud-ouest de l’église, l’ultime maison du commandeur, dernier témoin d’une implantation religieuse à Lavinadière.

LES OBJETS DÉCOUVERTS LORS DE LA FOUILLE ARCHÉOLOGIQUE Outre leur contribution à la datation des évènements révélés par la fouille, les objets ou fragments recueillis lors de la fouille participent également à la caractérisation des activités qui se sont déroulées sur le lieu même de leur découverte. Sur le site de Lavinadière, quelques uns de ces objets sont exceptionnels, comme par exemple l’arbalète et le gaufrier découverts en 2007 près de l’atelier du forgeron. Mais les nombreux autres fragments actuellement en cours d’étude témoignent également de la vie quotidienne au sein du prieuré puis de la commanderie.

Patrice Conte,
Service Régional de l’Archéologie, Drac du Limousin
Source : http://www.limousin.culture.gouv.fr/spip.php?article287